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Quoi de neuf du côté des docs – N°9

Une série de chroniques délibérément tournée vers l’art sous toutes ses formes, un état des lieux de la culture manouche et pour conclure des recettes italiennes pour savourer l’été !

 

Zao Wou-Ki

 

La générosité est encore de ce monde … La femme de Zao Wou-Ki vient de procéder à une double donation des œuvres et des collections de son défunt mari, respectant sa volonté. Classe ! Le musée Saint-Roch d’Issoudun a ainsi reçu en don des œuvres de l’artiste mais aussi celles issues de sa collection privée : dessins, tableaux, sculptures offerts par ses amis, artistes prestigieux tels Soulages, Klee, Picasso, Michaux (et bien d’autres plus ou moins célèbres mais tout aussi talentueux) Le musée Cernuschi à Paris a quant à lui reçu la collection particulière d’art chinois (Bronzes, estampes …) patiemment collectée par ce magnifique artiste de l’invisible…Cet ouvrage, catalogue des deux expositions, regroupe les œuvres présentées, ainsi qu’une présentation des artistes concernés , leur rencontre avec Zao Wou-Ki, et la correspondance entre leurs œuvres qui, parfois, se répondent en écho, tout en gardant leur originalité… L’amitié n’était pas un vain mot, un vague concept pour Zao Wou-Ki, l’homme des deux rives né en chine mais occidental d’adoption et de cœur. Il partageait avec les grands artistes qu’il appréciait le goût du partage et de belles affinités artistiques. Dans son art, la vie était omniprésente. Ses œuvres sereines ou tourmentées étaient le reflet de son vécu, en étroite adéquation avec les évènements graves ou heureux qui le bousculaient. Ce superbe ouvrage dresse un portrait émouvant d’un être d’exception ainsi que le panorama des plus beaux artistes du siècle passé et présent. Un livre précieux … Si vous passez par Issoudun ou Paris, ces merveilles y sont exposées respectivement jusqu’au 30 décembre et 23 octobre prochain.

Zao Wou-Ki, l’homme des deux rives, Flammarion, 2016 / 49€

 

 

de traits en empreintes

 

Pour les amoureux de cet artiste fabuleux, ce coffret d’artiste est une véritable caverne d’Ali Baba : 30 reproductions format A4, 15 cartes postales, 15 fac-similés des œuvres du prince, de l’énormissime Ernest Pignon-Ernest, à contempler pour le plus grand des plaisirs esthétiques ! Vous trouverez également dans cette boîte un livret où philosophe, historien d’art et commissaire d’expo exposent leur vision du travail du pape précurseur du street art. Ernest Pignon-Ernest a magnifié et fait parler les murs dans le monde entier, mettant en lumière lieux et évènements en choisissant soigneusement (et de manière engagée) chaque endroit où poser ses œuvres, au détour de ruelles ou dans dans des lieux symboliques. A chaque fois, il fait mouche, interpelle, émeut, questionne, ne laisse jamais indifférent… Deux expos sont réalisées dans sa ville natale de Nice au MAMAC jusqu’en janvier 2017 et à l’église abbatiale de Saint-Pons jusqu’au 2 octobre prochain. Si vous allez dans le sud, elles sont incontournables !  Totale admiration !!!

De traits en empreintes d’Ernest Pignon-Ernest, Gallimard, 2016 / 32€

 

 

testament manouche

 

Louis de Gouyon Matignon est tombé amoureux de la culture du peuple Manouche et de son âme, en premier lieu pour son amour pour leur musique et les accords magiques du grand Django. Il a rencontré cette communauté, s’est immergé auprès de ses membres et a même appris le romani qu’il parle désormais couramment. Ce jeune surdoué de 24 ans a même déjà rédigé plusieurs ouvrages à leur sujet et est considéré comme leur porte-parole par son engagement politique pour leur cause. Dans « Testament Manouche », il nous offre un tour d’horizon de l’histoire de ce peuple qui a subi tant de persécutions… Dès le 15ème siècle, tous les « Bohémiens » mâles sont condamnés aux galères à perpétuité, leurs femmes rasées et leurs enfants internés dans des hospices… Au 19ème siècle, ils subissent une déportation massive vers la Louisiane. Quant au siècle dernier, ils furent fichés par arrêté ministériel ce qui facilita leur déportation vers l’Allemagne nazie et l’internement dans des camps français où beaucoup périrent… Une histoire bien chargée qui explique aujourd’hui les difficultés de ces « éternels étrangers de l’intérieur » à préserver leur culture que les jeunes délaissent de plus en plus : la langue romani n’est plus parlée depuis deux générations, la sédentarisation s’accélère et même s’ils sont attachés à leur appartenance à leur communauté, les jeunes aspirent à s’assimiler dans la « normalité ». Ce bel ouvrage est un signal d’alarme pour la sauvegarde de cette culture différente, de son identité, de notre humanité…Les magnifiques photos de Benjamin Hoffman magnifient ce texte militant et apportent un éclairage lumineux, tendre et sans artifices sur un peuple en voie de disparition… Édifiant et superbe !

Testament Manouche de Louis de Gouyon Matignon et Benjamin Hoffman, Éditions de Juillet, 2016 / 37€

 

 

elina brotherus

 

Elina Brotherus s’expose, dans tous les sens du terme : de dos, face, profil, assise ou couchée, nue, fragile et désarmée, insolente et impertinente, la talentueuse photographe finlandaise nous livre son travail constitué en grande partie d’autoportraits dans des milieux naturels ou dans l’austérité d’appartements dénués de tout ornement, mais aussi de paysages magnifiés par un sens de la lumière hors du commun… Un travail sur l’introspection, véritable thérapie où elle dévoile son paysage intérieur, son rapport au temps, à la lenteur, la contemplation, sans artifices … La beauté est au cœur de son œuvre, mais sa recherche se trouve davantage dans la vérité que dans l’esthétique, cette démarche suscitant bien davantage d’émotions et de questionnements. Ses autoportraits comme ses paysages nous parlent de solitude, de détachement. Elle affirme que c’est la vie qui dirige son travail. En regardant son œuvre, c’est l’humanité, la nôtre qui se déploie… Une exposition lui est consacrée jusqu’au 25 septembre au pavillon populaire de Montpellier. Superbe et lumineux …

Elina Brotherus : la lumière venue du nord de Gilles Mora, Hazan, 2016 / 24,95€

 

 

Flor Garduno

 

Vous connaissez Flor Garduno ? A ma grande honte, je n’en n’avais jamais entendu parler…Par le biais de ce photopoche, j’ai eu le plaisir de découvrir une photographe hors du commun que j’ai le plaisir de vous présenter aujourd’hui… Née au Mexique, Flor durant son enfance a toujours été entourée d’animaux, et c’est tout naturellement que ces derniers tiennent une place centrale dans son œuvre où les humains s’animalisent en nous renvoyant à la culture chamanique. Elle a bourlingué dans l’Amérique centrale et latine, explorant la ruralité et les paysages, leur donnant une dimension parfois surréaliste par la grâce de ses clichés, toujours en noir et blanc, à la lumière somptueuse et irréelle. Les portraits qu’elle a réalisés des paysans rencontrés sur sa route sont d’une noblesse incroyable et semblent redonner de la dignité à ceux qui ne possèdent rien…La même grâce ressort de ses portraits de célébrités (des artistes qu’elle admire) qu’elle met en scène avec une fausse simplicité. Car ne nous y trompons pas, Flor Garduno est une artiste de la photographie construite ! Flor se destinait à la peinture… Elle en fut détournée au profit de la photographie grâce à l’initiation d’une femme d’exception, Kati Horna, photographe hongroise libertaire et engagée dans la lutte contre le fascisme. Flor lui doit sans doute (Elle avait alors à peine vingt ans …) son attachement à la liberté, et nous lui devons le bonheur de pouvoir contempler son travail aujourd’hui …Paysages, portraits, animaux, mais aussi natures mortes inspirées des maîtres de la peinture , nus flamboyants, mises en scène directement inspirées par la mythologie ou la religion, Flor Garduno donne à chacune de ses photos, quels que soient les thèmes qu’elle choisit, un éclat, une vérité, « un lieu de révélation ». Quelle continue longtemps à « suivre la voie des rêves » et à nous embarquer dans son univers onirique…

Flor Garduno, Actes Sud, 2016 / 13€

 

 

Lost on the Lot

 

Invités en résidence d’auteur à Capdenac, Guillaume Guerse et Marc Pichelin avaient la lourde et inédite mission de monter un projet autour de la bande dessinée avec la structure culturelle « Derrière le hublot », en lien direct avec leur lieu d’accueil. Ils se sont gratté la tête un moment pour chercher un angle d’approche jusqu’à ce qu’ils trouvent un concept non seulement original et personnel, mais en plus chargé d’une humanité exceptionnelle. Ils ont rencontré les gens de Capdenac tous âges confondus, les ont écouté parler de leur village, de leur vie présente ou passée pour les plus anciens, les ont questionné sur leur rapport à la culture, et « Gégé » les a croqués avec un talent, une tendresse qui touchent droit au cœur. Le résultat est bluffant ! On suit leur journal, leurs correspondances, leurs doutes et leurs enthousiasmes, leurs ballades autour de cette rivière chargée d’histoires et de ses abords. La nature est omniprésente et c’est une belle ballade qu’ils nous offrent, nonchalante et précieuse. Un CD d’ambiance sonore est jointe à cet album d’une qualité rare (Marc est phonographiste en plus d’être scénariste) et l’on se surprend à écouter bouche bée la pluie en forêt, le Lot sage ou en colère, les recettes de cuisine d’Yvette ou d’André, les récits de pêche miraculeuse (et parfois frauduleuse !) de Ripette, les projets de Jean le bricoleur passionné, la cueillette des champignons, le jardin ouvrier de Gérard… On navigue en barque ou en bateau à vapeur, à pied le nez au vent, on sent les odeurs et les sensations à chaque page… Ce livre est un petit miracle d’authenticité où les auteurs nous livrent leur vision d’un autre monde, solidaire et attaché à ses racines mais aussi à sa culture que l’association « Derrière le hublot » rend vivante par ses actions et par ses choix. Chapeau bas à tous ses acteurs de l’éducation populaire, à Guerse et Pichelin qui ont multiplié grâce à leur qualité d’écoute et leur bienveillance des « Émile Jacotey » touchants de vérité et de simplicité. Énorme coup de cœur !

Lost on the Lot de Guerse et Pichelin, Les Requins Marteaux, 2016 / 15€

 

 

monde chansons

 

Dans un précédent ouvrage « De la note au cerveau », Daniel Lévitin, musicien et neuroscientifique, avait démontré les effets de la musique sur toutes les zones du cerveau. Avec « le monde en six chansons », il poursuit son étude sur le sujet en partant du  postulat que la musique n’est pas seulement un passe-temps agréable mais un élément fondamental de notre identité… Il démontre en étayant sa thèse par l’avis de musiciens mais aussi d’intellectuels et de scientifiques, que les chansons (Qu’il classe en six catégories) aident non seulement à vivre mais sont également fédératrices en donnant à ceux qui les écoutent le sentiment d’appartenir au monde. On ne peut que lui donner raison si on analyse nos propres réactions lorsqu’on écoute de la musique, si on explore à quel point elle est liée à l’intime et au besoin de communier avec les autres… Reflets de nos émotions, de nos bonheurs comme de nos peines, de nos colères, les chansons sont ancrées en nous, profondément. Qui n’a pas eu le frisson, les larmes aux yeux en écoutant un refrain fortement lié à un épisode important de nos vies ? Les berceuses de notre enfance, LE morceau qui passait en bruit de fond quand on a fait une rencontre décisive dans notre vie prennent une dimension incroyable tout au long de notre existence… Nous sommes imprégnés par la musique, elle a le pouvoir de nous émouvoir, de nous réconforter, de nous faire sourire ou rire aux éclats et de nous donner le sens d’appartenir à un groupe…. Selon Nietzsche, sans la musique la vie serait une erreur. Selon Levitin, elle est la clé de notre adaptation, de notre évolution qui a permis la survie de l’être humain moderne. Brillant.

Le monde en six chansons de Daniel Levitin, Héloïse d’Ormesson, 2016 / 22€

 

 

easy italie

 

Si comme la plupart de vos congénères vous êtes fauchés et que vous devrez passer (dans le meilleur des cas) vos vacances dans votre jardin, ne désespérez pas ! Ce livre vous apporte toutes les saveurs de l’Italie, la canicule en moins ! A vous les pastas, les sauces savoureuses, risottos, panna cotta, zuccotto ! Vous acquerrez toutes les bases pour cuisiner des petits plats aux saveurs méditerranéennes. Pour la plupart, ce sont des recettes familiales, sans chichis, qui vous sont proposées et qui ne nécessitent pas un matériel de fou ni un savoir faire exceptionnel, donc, à la portée de tous (ou presque…) Bon voyage dans vos assiettes !

Italie, les meilleures recettes familiales de Carole Saturno, Mango, 2016 / 15€

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