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Krons

Quoi de neuf du côté des docs – N°8

ça y est, c’est l’été, malgré une météo bien maussade… Tant pis s’il pleut, munissez-vous de bons bouquins, et si la canicule arrive, vous pourrez les savourer à l’ombre ! Quelles meilleures compagnies rêver que celles de Patti Smith, Sylvain Tesson, Tignous et Wolinski ? Et un petit panorama de l’histoire des arts, ça vous tente ? Bonnes vacances !

 

M train

 

“M train” n’est pas une autobiographie ordinaire où les faits s’alignent mécaniquement, de manière chronologique. Patti Smith ne raconte pas sa vie. Elle la rêve, la transcende au gré de ses intuitions, étourdie par les flashs de ses souvenirs, parfois au bord de la désespérance, lorsqu’elle évoque la mort de Fred, son mari et père de ses enfants (survenue en 1994) ou le décès brutal de Todd, son frère adoré, quelques semaines plus tard…Patti nous convie à une balade nostalgique et poétique frôlant parfois le mystique où la perte est au cœur de tout : celle des êtres chers, des rêves inassouvis, des rendez-vous manqués… Au gré de ses coups de tête ou de cœur, elle prend la route aux quatre coins du monde, toujours en pèlerinage vers ses aspirations poétiques et littéraires ou sur les traces de son passé, se rendant au Mexique dans la maison de Frida Kahlo, sur les tombes de Genet, d’Akutagawa, de Sylvia Plath et de bien d’autres encore, suivant les signes qui lui sont envoyés et n’écoutant que son instinct. Quand elle ne voyage pas, Patti Smith est plutôt du genre solitaire, vivant entourée de ses chats dans son appartement new-yorkais. Ses journées sont alors réglées sur un rite immuable: coiffée de son bonnet et vêtue de son manteau noir fétiche, elle se rend chaque matin dans son bistrot préféré, où toujours installée à la même table, autour d’une tasse de café, d’une coupelle d’huile d’olive et d’un toast, elle griffonne sur des serviettes en papier les pensées qui l’assaillent. Parsemé de ses photos (Son Polaroïd n’est jamais bien loin de son œil bienveillant) « M Train » est un douloureux et émouvant voyage commencé il y a quelques années avec son premier recueil “Just kids”. Mélancolique et poétique, la lecture de cet ouvrage offre un moment hors du temps, et laisse entrevoir le portait d’une femme cultivée, talentueuse et attachante…Laissez-vous porter, bercer par la voix hypnotique et la poésie de cette belle artiste…

M Train de Patti Smith, Gallimard, 2016 / 19,50€

 

 

bérézina

 

Après avoir passé un hiver entier solitaire au milieu de nulle part dans une cabane au bord du lac Baïkal, bourlingué un peu partout dans le monde, à pied, à cheval ou en moto, escaladé, grimpé, crapahuté sur les moindres recoins de la planète, Sylvain Tesson, une fois de plus nous épate avec cette nouvelle épopée ! Refaire le trajet de la retraite de Russie, en moto side-car, de Moscou à Paris en plein hiver, il fallait oser ! Et il l’a fait, accompagné de deux amis, le photographe Thomas Goisque (fidèle compagnon de Tesson qui a participé à plusieurs de ses aventures) et de Cédric Gras (Directeur d’un centre culturel français en Ukraine) auxquels se sont rajoutés deux amis russes, Vitaly et Vassili (des pros de la mécanique sur Oural !). Agrémenté des textes des survivants (tels Caulaincourt ou Bourgogne, pour ne citer que les plus renommés), on suit au jour le jour le calvaire enduré par l’armée napoléonienne : les descriptions des champs jonchés de cadavres, cette horreur inimaginable, les scènes de cannibalisme, les chevaux dépecés encore vivants par les hommes affamés et transis de froid… Ce récit de voyage a bien sûr valeur de témoignage historique. Mais Sylvain Tesson n’en n’a pas pour autant perdu son sens de l’humour et nous régale de bons mots lorsqu’il évoque les soirées de beuverie et de rigolade après les diverses galères traversées chaque jour au cours de ce long et glacial périple. Ce carnet de voyage hallucinant, ce road-movie au cœur même de l’histoire est aussi un bel  hommage à ces hommes dévoués jusqu’à la mort à leur chef suprême… Ivre d’aventures périlleuses, Sylvain Tesson ne manque en aucun cas ni de courage ni de panache…L’âme slave, à l’état brut !

Bérézina de Sylvain Tesson, Gallimard, 2016 / 7,10€

 

 

la corse prend le maquis

 

Tignous s’était fait plein de potes en Corse où il se rendait régulièrement en famille. Et la Corse, ça se mérite !!! Même le pauvre Siné avait vu sa maison partir en fumée (Comme tant d’autres !) … Quand le Corse pas content, le Corse dynamite ! Tignous, lui, a été accepté par les irréductibles habitants de l’île de beauté, car il ne se rendait pas uniquement là-bas pour se la couler douce dans le maquis … Il y a créé des amitiés sincères, y était respecté et actif au sein d’associations comme le festival du vent de Calvi où il avait rejoint le comité de rédaction du journal « Festiventu ». Il avait également réalisé l’emblème de la campagne « Halte aux sacs plastiques » (qu’il est inutile de présenter, son nom étant suffisamment évocateur!) sans oublier le procès d’Yvan Colonna, qu’il avait intégralement couvert, révélant du même coup ses talents  de dessinateur d’assises… Tignous aimait la Corse. Et elle le lui rendait bien. Mais qui aime bien châtie bien, non ? C’est le constat qui s’impose en feuilletant ce superbe album qui réunit une centaine de dessins que Tignous a réalisé sur le sujet. S’il n’épargnait pas les travers de ses amis en faisant preuve de lucidité, il égratignait sans vraiment mordre… La tendresse n’était jamais loin, cachée sous son humour mordant et son immense talent… Espérons qu’il ait mis en pratique la devise du fronton du piano-bar « Chez Tao », qu’il aimait fréquenter… « Vivez heureux aujourd’hui car demain il sera trop tard »…

La Corse prend le maquis de Tignous, Le Chêne, 2016 / 14,90€

 

 

wolinski

 

Ah ! Les années 70 et ce délicieux vent de liberté et d’insolence… Les journaux satyriques de l’époque tels « L’enragé », « Hara Kiri » ou « Charlie Hebdo » reflétaient comme un miroir les aspirations de toute une génération chevelue, anticonformiste, avec des idéaux plein la tête … Comment ne pas être nostalgique de cette époque bénie ?! Dans ce magnifique ouvrage, Wolinski nous livre ses souvenirs de cette période prolifique où il a collaboré de près ou de loin à tout ce qui pouvait être subversif et politiquement incorrect. Il raconte les amitiés solides et fidèles, les coups de gueule et les fous rires, les bouclages interminables où les dessins fusaient à profusion avec les débats qui s’ensuivaient pour choisir les fameuses « Une » qui faisaient marrer la France entière (Euh… pas toute !). Saviez-vous que ces croquis (qui évidemment n’étaient pas tous retenus) portaient le joli nom « d’échappés » ? Ce ne sont pas moins de 500 de ces dessins réalisés par Wolinski durant cette période qui sont réunis dans cet album ! Sur les thèmes récurrents chers à son cœur, politique, flics et militaires, religions, faits de société, personne n’échappait à son humour grivois où les femmes (libres et épanouies) tenaient une place de choix. Un document rare et émouvant sur cet artiste et sur ses légendaires « couvertures auxquelles vous avez échappé »… Collector !

Wolinski mes années 70, Les Échappés, 2014 / 32€

 

 

zapping histoire des arts

 

Cet ouvrage nous offre un large tour d’horizon de toutes les formes d’art à travers les siècles : Peinture, sculpture, musique, littérature, théâtre, danse, cinéma, architecture, BD, aucune de ces disciplines ne semble avoir été oubliée, des arts premiers aux créations contemporaines. … l’auteur a fait sa propre sélection, zappant d’une œuvre à l’autre, selon des critères bien établis, mais aussi en fonction de ses propres goûts, rendant ce choix évidemment non exhaustif : quand on aborde autant de beauté, il faut bien se résigner à faire des choix, qui ont d’ailleurs dû être cornéliens ! Semé d’anecdotes (on apprend beaucoup de choses !), ce pavé sur l’histoire des arts est un pur régal où l’on pioche,  grappille, de ci-de là, au gré de ses envies…Un vrai zapping, mais sans télécommande ! Bref, pour les néophytes, cet ouvrage est un bel exemple de vulgarisation réussie. Quant aux plus confirmés, ils pourront se confronter aux choix des œuvres retenues par cet auteur, historien d’art, musicologue et écrivain, et imaginer quelle aurait été leur propre sélection. Ludique et enrichissant, du plaisir !

Le zapping de l’histoire des arts de Gérard Denizeau, Larousse, 2016 / 17, 95€

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