La soudure à l’arc, on connait. Vous savez, ces types avec un casque genre Dark Vador qui, au lieu d’un sabre laser, brandissent des chalumeaux qui balancent des gerbes d’étincelles. Et puis, il y a cette expression de plus en plus remise au goût du jour : « faire la soudure », qui signifie en gros, joindre les deux bouts. Exercice périlleux et rarissime pour le commun des mortels, qui se répète comme une malédiction chaque fin de mois … Ryan et Cyndie sont jeunes, follement amoureux et fauchés comme les blés (autre expression très en vogue …). Comment s’insérer dans la société quand on n’a pas un rond et qu’on n’est pas issu d’un milieu aisé ? L’usine, les petits boulots ? Ryan a testé et décidément, ce n’est pas du tout rentable … Sur les conseils d’un avocat (complètement véreux), il va tenter une réinsertion dans le monde plus lucratif de la délinquance… Dealer ? Trop risqué … Gigolo pour dames friquées mais (très) vieillissantes ? Le cœur et le reste d’ailleurs, n’y est pas. Après moult réflexions, Ryan décide de devenir voleur, mais nuance, voleur militant ! Toute une faune évolue autour de nos deux tourtereaux, personnages tous plus fantasques les uns que les autres, des potes gitans aux patronymes délirants (Rambo Patrac, j’adore !) au capitaine de péniche amoureux des belles lettres, incollable sur Homère et l’Odyssée, en passant par le flic revanchard, caricature à peine voilée d’un inspecteur Harry un peu crétin, mais tenace !. Bien sûr, il y a des rebondissements, des trahisons, et de jolis moments de poésie dans ce roman. Bien sûr, l’humour y tient une place prépondérante, mais pas seulement ! Le quotidien et les choix de vie des protagonistes des personnages d’Alain Guyard donnent matière à réflexion sur notre société, sans faire d’esbroufe. Si vous avez aimé « la soudure », deux autres ouvrages de cet auteur vous restent à découvrir : « la zonzon » et « 33 leçons de philosophie par et pour les mauvais garçons » chez le même éditeur. Du bonheur de lecture en perspective !:
La soudure d’Alain Guyard (Le Dilettante, 2015 / 18€)
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C’est avant tout à une magnifique histoire d’amour que nous convie Philippe Mouche. Celle qui a uni Valentina dit « le diablotin » à Simon. Valentina était une photographe renommée depuis la parution d’un cliché de la chute du mur de Berlin qui a fait le tour du monde. Elle était sauvage, instinctive, rebelle et imprévisible. Simon, lui, est journaliste. Depuis la mort de son diablotin, plusieurs années auparavant, Simon tourne en rond… Son métier le passionne de moins en moins, interviewer des « people » lui paraît de plus en plus factice. Fondateur d’un groupement de journalistes, « Les mercenaires de la virgule », Simon a de plus en plus de mal à trouver sa place auprès de ses pairs, mais aussi dans sa vie… Jusqu’au jour où il reçoit une enveloppe contenant une photo qu’il avait prise de Valentina, chez elle, au Portugal. Qui est l’expéditeur ? Et pourquoi cet envoi, si longtemps après la mort de sa bien-aimée ? Comme un rituel, tous les mardis, une nouvelle photo arrivera, avec le même mode opératoire, sans autre forme d’explications… des photos prises par Valentina, comme une énigme, un puzzle à reconstituer…En suivant le fil de ce mystère, Simon retrouvera l’envie et l’énergie d’écrire et de vivre, guidé par le regard de Valentina…Philippe Mouche nous offre une jolie réflexion sur l’acte d’écrire, de témoigner, et sur la force de l’image. Le texte est fort, empreint d’une sensibilité à fleur de peau… Beaucoup d’émotions à la lecture de ce superbe roman d’une belle originalité. Philippe Mouche a travaillé pour le journal « Libération » et est également l’auteur de deux romans : « Le complot Gutenberg » et « La place aux autres »chez le même éditeur.
32 photos de Valentina Kallenbach de Philippe Mouche (Gaïa, 2015 / 19€)
La première partie de ce roman commence par des petites réflexions, instantanés poétiques ou humoristiques d’un homme qui sait se balader le nez au vent . Au fil des pages, se dessine la trame de l’histoire que va nous raconter le narrateur. Le lieu ? Une île, en Bretagne. L’endroit idéal pour quelqu’un ayant soif de solitude Et en dehors de sa logeuse, notre Robinson ne rencontre que des mouettes, fuyant autant que possible ses congénères. Jusqu’au soir où il voit débouler le maire et son conseil municipal frapper à son huis de location. Ces derniers viennent s’enquérir d’une rumeur persistante qui plane sur l’île …. Le prochain James Bond y serait tourné et le vacancier taciturne serait non en vacances mais en repérage sur l’île pour la production ! Au lieu de démentir, notre paisible et néanmoins farceur s’amuse à jouer le jeu et dessine le scénario du futur 007 dans l’allégresse générale …En voilà un OLI (objet littéraire identifié) ! Jamais rien lu de pareil, moi ! C’est drôle, décapant, inattendu, et complètement barré ! Je ne sais pas à quoi carbure Laurent Graff, mais dans tous les cas, ça lui réussit et à nous aussi, ses heureux lecteurs ! Une dose de bonne humeur et d’humour déjanté salvateur.
Au nom de sa majesté de Laurent Graff (Le Dilettante , 2015 / 14€)