AMERICAN SNIPER
Cinéma

Y’A DU CINÉ DANS L’AIR ! – N° 44

AMERICAN SNIPER

de Clint Eastwood (Bradley Cooper, Sienna Miller, Luke Grimes)

 

american sniper 2

De grands noms du septième art d’outre-Atlantique n’ont jamais caché leurs opinions politiques, aussi condamnables soit-elles, et s’en sont même fait, pour certains, une spécialité de les véhiculer à l’intérieur des projets auxquels ils étaient associés, sans que cela, toutefois, ne nuisent forcément à la qualité intrinsèque.
Prenez John Wayne dans « LES BÉRETS VERTS » et surtout « ALAMO » et la plupart de ses westerns tardifs, ou bien Charlton Heston (la NRA, son engagement pro-life), beaucoup étaient républicains ou le sont toujours.
Parmi les vivants, il reste Clint Eastwood.
L’intérêt de sa filmographie (en tant qu’acteur ou metteur en scène), imposante dans tous les sens du terme, est de voir l’évolution sociale et politique du pays de l’Oncle Sam, décennie après décennie, entre apogée et déclin.
Réac, le Clint ? Bien sur, mais pas que, ce serait trop simple.
A l’annonce de son adaptation du livre autobiographique de Chris Kyle, un tireur d’élite légendaire de l’armée US, crédité de plus de 200 morts lors du conflit irakien, on pouvait craindre le pire (cf. «LE  MAÎTRE DE GUERRE »).
Qu’en est-il donc de cet « AMERICAN SNIPER » ?
Révélant, dès son plus jeune âge, un talent certain au tir, Chris Kyle (Bradley Cooper, sans plus là) s’engage dans les Navy Seals. Lors de la troisième guerre du Golfe, ses faits d’armes deviennent vite célèbres et les insurgés ne tardent pas à mettre sa tête à prix…
Depuis « GRAN TORINO », Eastwood a enquillé le mauvais avec « INVICTUS », insupportable pub « Benetton », et « AU DELÀ » puis le poussif via « J. EDGAR » et surtout « JERSEY BOYS », qui partait pourtant d’une bonne intention.
Ici, il souffre, à son désavantage, de la comparaison avec « DÉMINEURS », le chef-d’oeuvre de Kathryn Bigelow, car sa vision de son compatriote, véritable star en son pays, n’est jamais immersive, au contraire du parcours du sergent William James/Jeremy Renner chez l’ex de James Cameron.
Déjà, dès le départ, l’auteur d’« IMPITOYABLE », lors d’une scène de chasse de jeunesse expédiée à la va-vite, échoue à expliciter les fondements de l’éducation de notre futur machine à tuer.
Esuite, hélas, la linéarité sera de mise.
Entre la dislocation progressive du couple modèle (lui sur le terrain, elle restée aux States) et les troubles de stress post-traumatique, il n’existe aucune variation dans le traitement de ces poncifs.
De plus, on sent l’ancien cow-boy de Sergio Leone comme répugner ou du moins gêner à l’idée d’écorner ou de remettre en question les fondements nationaux que sont la Bible et le fusil, ce qui aurait eu, justement, un intérêt.
Et ce n’est pas la tentative d’instaurer un affrontement à la « STALINGRAD » de Jean-Jacques Annaud, histoire de légitimer les actions des protagonistes, qui change quoi que ce soit.
Evitant, certes, le piège de l’hagiographie béâte, Clint Eastwood n’en livre pas moins un drame manquant cruellement de pertinence, éclaircissant ainsi le carton au box-office états-unien.
Toute société a les films qu’elle mérite.

 

 

RÉALITÉ

de Quentin Dupieux (Alain Chabat, Elodie Bouchez, Jonathan Lambert)

 

REALITE

J’ai déjà, ici même, disserté sur le cas Dupieux.
Hormis « NONFILM », son moyen métrage, et « STEAK » autour du duo Eric et Ramzy, je ne goûte guère le reste de ses tentatives qui, de « RUBBER » à « WRONG », puis « WRONG COPS », faisaient état d’une malhonnêteté intellectuelle.
Car déclarer pratiquer son métier en dilettante me dérange surtout lorsqu’on veut se la jouer petit futé.
Ca, c’était jusqu’à « RÉALITÉ ».
Jason Tantra (Alain Chabat), cameraman d’une émission télé de cuisine, désire absolument réaliser une série B horrifique. Pour ce faire, il contacte Bob Marshall (Jonathan Lambert), un riche producteur qui accepte de le financer, uniquement si celui-ci lui trouve le meilleur gémissement de tous les temps…
Je ne sais si Mr Oizo l’a fait exprès car, après vingt minutes horripilantes, sans rythme, pas drôles, force est de reconnaître qu’une ambiance prenante s’installe allant crescendo jusqu’à une pirouette finale, facile, mais qui passe.
Chabat fait son Chabat et les références à Cronenberg ne manquent pas.
Mais surtout, surtout, ne me mentionnez pas David Lynch, car les maigres louanges que je viens de professer pourraient bien alors disparaître lors du prochain méfait du père Quentin.
Et puis la foudre ne frappe jamais deux fois au même endroit.

 

 

BOB L’ÉPONGE – LE FILM : UN HÉROS SORT DE L’EAU (3D)

de Paul Tibbitt (Avec les voix de Tom Kenny, Bill Fagerbakke, Clancy Brown)

 

BOB L4EPONGE

Lorsque la recette du pâté de crabe se volatilise, rien ne va plus à Bikini Bottom. Bob l’éponge, accusé à tort, se voit dans l’obligation de fuir et de s’associer à son ennemi, Plankton pour découvrir le véritable coupable et s’innocenter…
Une décennie s’est écoulée depuis les début en salle du perso tout jaune de la série tv créée par Stephen Hillenburg.
« BOB L’ÉPONGE – LE FILM : UN HÉROS SORT DE L’EAU » bénéficie des progrès techniques et cela se voit.
Fluidité de l’animation et enchaînement de gags absurdes se complètent parfaitement.
Outre la présence d’Antonio Banderas, cabotinant en pirate machiavélique, ce qui frappe avant tout, c’est le délire général proposé.
Car, entre séquences psychédéliques incongrues mais jouissives et calembours à double sens, ce plaisir coupable est plus pour les adultes que les enfants.
Un avertissement : ne vous fiez pas à la bande annonce, très superficielle, qui ne prépare absolument pas à ce qui vous attend.
Ce, en définitive, pour votre ravissement le plus complet.

 

 

VINCENT N’A PAS D’ÉCAILLES

de Thomas Salvador (Thomas Salvador, Vimala Pons, Youssef Hadji)

 

VINCENT N'A PAS D'ECAILLES

Rares sont les oeuvres hexagonales abordant la mythologie du super-héros aux pouvoirs surnaturels.
En BD, évidemment, « Superdupont » de Lob et Gotlib et quelques autres.
Au cinéma, par contre…
Alors que, la semaine prochaine, débarque le bancal « BIRDMAN » d’Alejandro González Iñárritu, variation ricaine sur le thème, penchons-nous sur ce « VINCENT N’A PAS D’ÉCAILLES », made in France.
Vincent, la trentaine, erre sur les routes de France en trouvant du travail ici et là. Il a un secret : une fois dans l’eau ou mouillé, il obtient une force surhumaine et peut ainsi effectuer des exploits hors du commun. Sa rencontre avec Lucie, une artiste, va lui permettre de se stabiliser…
Avec une approche intimiste du sujet (le droit à la différence), sans effets ostentatoires, Thomas Salvador – qui s’octroie le rôle principal – signe, pour son premier long métrage, une chronique singulière attachante, poétique, haletante vers la fin, avec un usage réfléchi sur le son qui entoure les personnages, invitant à la méditation.
La pétulante Vimala Pons (« LA FILLE DU 14 JUILLET ») ajoute au climat d’étrangeté de l’ensemble.
Après « LES RENCONTRES D’APRÈS MINUIT », « LA RUE DE SOLFÉRINO » ou encore « TONNERRE », voici une nouvelle preuve de la vitalité d’une jeune garde de réalisateurs prometteurs.
Si les amerlocs ont L’HOMME DE L’ATLANTIDE, désormais, nous, nous avons « VINCENT ».

 

 

Le DVD de la semaine : « LE MANOIR DE LA TERREUR »

de Martin Herbert / ARTUS FILMS

 

le manoir de la terreur jaquette

 

Des filles aux déshabillés vaporeux errant dans des couloirs lugubres, des hululements, des ruines au clair de lune – théâtre de bien des mystères – des aristocrates passablement dérangés, des servantes inquiétantes, des malédictions…
Oui, tout cela et plus encore, c’est ce que proposa le gothique au cinéma à l’orée des « sixites ».
Qu’il soit américain avec Roger Corman et sa firme A.I.P, anglais avec le studio Hammer ou italien, ce courant fantastique fit frissonner avec délice les spectateurs d’alors.
En couleur ou en noir et blanc, ces cauchemars couchés sur pellicule ne tardèrent pas à devenir cultes, influencèrent nombre de metteurs en scène et maintiennent intacte la fascination.
ARTUS FILMS, éclectique maison d’édition DVD dont on vous a dejà parlé et dont on continuera à suivre de près l’actualité, poursuit sa réédition de certains « classiques » transalpins de ce genre majeur.
Cette fois, il s’agit du « MANOIR DE LA TERREUR ».
A la fin du XIXème siècle, en 1884 plus précisément, dans le Nord de la France, une fille d’aristocrate, Emily Blackford, se rend dans le château familial suite au décès brutal de son père. Là, son frère occupant les lieux lui explique que leur géniteur a péri brûlé dans un incendie accidentel. Bientôt, notre jeune noble est hantée dans ses rêves par de troublantes apparitions…
Faute d’une sortie tardive chez nous en 1966, alors qu’il date de 1963, « THE BLANCHEVILLE MONSTER » (titre US) a été quelque peu déconsidéré par les amateurs car la plupart des fleurons de la catégorie étaient déjà apparus sur le marché : « LE MASQUE DU DÉMON » de Bava, « LE MOULIN DES SUPPLICES » de Giorgio Ferroni, « LA VIERGE DE NUREMBERG » de Margheriti ou encore « L’EFFROYABLE SECRET DU DR. HICHCOCK » de Riccardo Freda.
Et pourtant cette coproduction italo-espagnole est assez remarquable.
D’après le générique, l’histoire serait tirée d’Edgar Allan Poe (argument commercial typique).
Hormis quelques vagues ressemblances, on cherche encore mais qu’importe.
Suspense bien dosé, utilisation efficace des décors, photo somptueuse, acteure et actrices en devenir et déjà forts d’une présence indéniable – Leo Anchóriz (l’excellent « TUEZ LES TOUS… ET REVENEZ SEUL ! ») mais surtout Helga Liné, allemande d’origine, pas encore vedette incontestée du bis européen – belle copie proposée, tout concourt à passer un agréable moment.
Derrière le pseudonyme de Martin Herbert, se camoufle Alberto de Martino, grand maître du cinoche populaire, qui, du péplum (« PERSÉE L’INVICIBLE ») à « L’ANTÉCHRIST » – clone de « LA MALÉDICTION » – en passant par l’espionnage (le rigolo « OPÉRATION FRÈRE CADET » avec le propre frangin de Sean Connery) fit toujours preuve d’aptitude assez remarquable.
A signaler l’existence d’un autre « MANOIR DE LA TERREUR », datant de 1981, ouvertement gore, avec des zombies, du à d’Andrea Bianchi, et dont le distributeur de l’époque, malin comme un singe, avait gratifié du même numéro de visa d’exploitation que celui de 63, afin de contourner la censure.

 

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