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Cinéma

Y’A DU CINÉ DANS L’AIR ! – N° 75

REGRESSION

de Alejandro Amenábar (Ethan Hawke, Emma Watson, David Thewlis)

 

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Dans ces colonnes, j’ai souvent professé que les espagnols, après une période de ventre mou, faisaient certains des meilleurs films de genre du monde depuis une bonne quinzaine d’années.
Que ce soit avec le maître absolu en la matière, Álex de la Iglesia (d' »ACTION MUTANTE » aux « SORCIÈRES DE ZUGARRAMURDI » en passant par « MES CHERS VOISINS » et au moins cinq autres incontournables et parfois méconnus, comme « MORT DE RIRE »), Jaume Balagueró – le papa de « [REC] » et du formidable « MALVEILLANCE » – Pedro Almodóvar qui s’y met parfois avec bonheur (« LA PIEL QUE HABITO ») et même une jeune garde symbolisée par le récent et splendide « LA ISLA MÍNIMA » d’Alberto Rodriguez, tous sont quelque part les descendants de Luis Buñuel.
Hollywood, inévitablement, comme avec l’Asie, tenta d’attirer un maximum de ces talents.
Certains comme Juan Antonio Bayona (« L’ORPHELINAT ») cédèrent aux sirènes de l’Oncle Sam et s’en tire plutôt correctement (« THE IMPOSSIBLE »).
C’est également le cas d’Alejandro Amenábar qui traversa l’Atlantique mais qui s’est un peu égaré depuis.
Autant ses débuts, dans les années 90, avec le troublant « TESIS » sur l’univers des « snuff movies » ou l’entêtant « OUVRE LES YEUX » sur la paranoïa d’un meurtrier, marqua les esprits, autant la suite déçut légèrement.
Hormis sa seule incursion dans les gros studios américains, « LES AUTRES », sensible hommage au fantastique anglais avec Nicole Kidman, notre ibère revint en Europe ou via le joli mais poussif « MAR ADENTRO » et sa fresque philosophico-mystique « AGORA », il laissa perplexe, semblant être dépassé par la teneur même de ses propres oeuvres.
De nouveau de l’autre côté des flots, voici son nouveau long métrage, tourné au Canada, « REGRESSION ».
A t-il redressé la barre ?
Minnesota, 1990. John Gray, un père de famille apparemment sans histoire, est accusé d’inceste par sa fille Angela. Il avoue son crime mais sans garder le moindre souvenir des faits. L’inspecteur Bruce Kenner décide alors d’enquêter, et, avec l’aide d’un fameux psychologue, va tenter de faire retrouver la mémoire au malheureux papa. Notre duo est loin de se douter que ce qui l’attend…
Ouvertement référentiel stylistiquement et thématiquement aux « classiques » des seventies, signés par William Friedkin (« L’EXORCISTE »), Polanski (« ROSEMARY’S BABY ») ou Richard Donner (« LA MALÉDICTION ») mais également à quelques Lumet et de Palma, ce thriller mélange secte satanique, légendes urbaines et théories sur le fonctionnement de notre cerveau.
Malheureusement, le liant entre tout ça ne se fait jamais et nous sommes alors trimballés dans une sorte de Grand Huit chaotique où bien vite apparaissent les limites de l’entreprise.
Le sieur Alejandro se délite au fur et à mesure que l’on avance, échouant à convaincre, versant dans le grotesque et l’alambiqué inutilement, avec des acteurs qui ne semblent pas trop y croire à l’exception d’Emma Watson et d’un Ethan Hawke, du moins pendant une demie-heure.
Le principal défaut est le manque de saleté, de putride de l’ensemble.
Tout est trop « propre », trop soigné, et l’irruption de l’irréel dans le réel ne peut pas marcher pour cause d’une assise rarement propice à l’immersion.
Donc la réponse à la question : Amenábar(re) baissé(e).

 

 

THE WALK – RÊVER PLUS HAUT (3D)

de Robert Zemeckis (Joseph Gordon-Levitt, Charlotte Le Bon, Ben Kingsley)

 

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Philippe Petit est un funambule français qui accéda au vedettariat pour avoir illégalement traversé sur un fil tendu entre les deux tours du World Trade Center de New-York, en 1974.
Cette aventure extravagante est le sujet du dernier-né de Robert « RETOUR VERS LE FUTUR » Zemeckis.
Si Joseph Gordon-Levitt est impressionnant de mimétisme avec le vrai Philippe Petit dans ses attitudes et son tempérament (ce dernier lui servit de coach pour le rôle), il est bien seul dans ce « THE WALK », que le responsable de « ROGER RABBIT » a pourtant pensé entièrement en 3D (et au regard des prouesses qu’il avait exécutées sur « BEOWULF » ou « SCROOGE, on en salivait d’avance).
Cette fois, Zemeckis tombe dans le piège qu’il avait si habilement évité auparavant : celui de ne pas équilibrer le côté humain, émotionnel avec celui plus froid de la technique pure.
Du coup, jamais on ne se prend de réelle empathie pour le héros (à l’exception de la traversée proprement dite, impressionnante, vertigineuse, mais ne durant que 20 mn sur 2 heures).
Ajoutons que les protagonistes secondaires (Charlotte Le Bon, Clément Sibony) sont réduits à l’état de simples silhouettes, sans impact alors qu’en réalité, ils ont été des rouages essentiels dans la réussite du projet.
Après « FLIGHT », ce vieux Bob déçoit encore.
Plutôt que de dépenser votre thune pour ça, mettez là plutôt dans l’achat de l’exceptionnel documentaire « MAN ON WIRE » ou vous aurez le seul et l’unique Philippe Petit, ses acolytes et leurs témoignages vidéo de l’époque qui retracent en direct leur folle équipée.

 

 

THE LOBSTER

de Yorgos Lanthimos (Colin Farrell, Rachel Weisz, Léa Seydoux)

 

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Yorgos Lanthimos est le chef de file d’un néo-cinéma grec basé sur l’absurde, accompagné parfois d’une certaine violence psychologique.
Il nous donna l’épatant « CANINE » en 2009 centré sur des adolescents aux comportements particuliers et, en 2011, le moins réussi « ALPS » malgré quelques attraits.
Franchissant l’océan, il se tente maintenant une expérience hollywoodienne avec « THE LOBSTER », qui fut présenté en sélection officielle, sur la croisette, en mai dernier.
Dans une société du futur, tous les célibataires sont arrêté(e)s et emmené(e)s à l’Hôtel où chacun a 45 jours pour trouver l’âme-soeur. Passé ce délai, il(elle) sera transformé(e) en animal de son choix. Des chasses à l’encontre des rebelles sont également organisées et permettant aux pensionnaires, en fonction du nombre de capturés, de gagner des journées supplémentaires. David vient d’arriver et, si jamais il échoue, désire se changer en homard…
Comportant deux parties distinctes, cette oeuvre inégale est pourtant une des plus aboutie du cru cannois 2015.
La première moitié est absolument fascinante, décalée, nonsensique à souhait, rappelant aussi bien les Monthy Python que les frères Coen, et égratignant sans vergogne notre propre modèle sociétal où les couples explosent de plus en plus.
Colin Farrell s’avère superbe en homme médiocre.
La seconde, changeant de ton, évoluant vers un registre plus dramatique, piétine en tombant dans une contemplation poétique pas toujours aboutie et quelque peu longuette.
Malgré tout, « THE LOBSTER » reste vraiment une curiosité assez réjouissante dans la production US mainstream actuelle et mérite amplement son prix (en l’occurrence celui du Jury), contrairement à la plupart de ses petits camarades également récompensés.

 

 

LOLO

de Julie Delpy (Julie Delpy, Dany Boon, Vincent Lacoste)

 

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Violette, quadragénaire, travaille dans la mode à Paris et se rend compte que sa vie amoureuse est un désastre. Lors d’un séjour en thalasso à Biarritz avec sa meilleure amie, elle fait la connaissance de Jean-René, petit informaticien local, qui vient de divorcer. Tous deux se plaisant mutuellement, ils entament alors une relation passionnelle qui conduit Jean-René à venir s’installer et travailler à la capitale. Seulement, Violette a un fils chéri, Lolo, la vingtaine, qui s’arrange toujours pour ruiner le couple de sa mère, ne supportant pas que celle-ci puisse lui préférer un autre homme…
Mais que c’est-il passé ?
Comment la talentueuse auteur de « LA COMTESSE » et de « TWO DAYS IN PARIS » a pu tomber si bas ?
Car cette comédie, pourtant un genre que notre Julie affectionne, est navrante.
On ne rit jamais, à moins – vu le niveau de beaufitude des blagues – d’être fan des « dubosqueries » de « CAMPING » et consorts.
Et encore, rien n’est moins sûr.
Ce qui chagrine avant tout, c’est d’être confronté à autant de lourdeur de la part d’une actrice/réalisatrice qui nous avait habitués à de la légèreté, à de la pertinence, à un véritable point de vue.
Ici, les dialogues indigents et inutilement grossiers, la mise en scène d’une paresse crasse (la photo en devient anecdotique alors qu’elle est quand même due à Thierry Arbogast, chef op réputé hexagonal – Besson, Kusturica, Rappeneau, Kassovitz) et un scénario mal écrit (les comédiens font ce qu’ils peuvent mais en sont tributaires) imposent un calvaire au spectateur qui attend que cela se termine au plus vite.
Et de rentrer, ensuite, chez lui, complètement delpyté.

 

 

L’affiche de la semaine : « THE REVENANT » de Alejandro González Iñárritu

Le mexicain le plus passionnant de l’industrie actuelle avec Guillermo del Toro et Alfonso Cuarón nous excite grandement avec son prochain film, un western survivaliste avec Leonardo DiCaprio en trappeur laissé pour mort dans une Amérique profonde et dangereuse où il devra affronter un hiver brutal et de redoutables tribus guerrières.
La bande-annonce laisse présager de la sauvagerie opératique.
Mais le sublime poster, ci-dessous, laisse entrevoir aussi des instants calmes et contemplatifs à la « JEREMIAH JOHNSON ».
Verdict, le 24 février 2016, dans les salles.

 

revenant

 

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